Microfabrication avec le rayonnement synchrotron (S. Megtert, F. Bouamrane, T. Bouvet)
Contact : Fayçal Bouamrane
Jusqu’à un passé récent, la très grande majorité des microcomposants ou des micro-systèmes relevait des techniques de la micro-électronique. Ils étaient réalisés en silicium et possédaient une géométrie planaire. Cela provient du fait que la lithographie optique, les résines photosensibles et l’usinage du silicium avaient été développés à cet effet. Il est évident que la troisième dimension manquante peut être un avantage décisif pour certaines applications qui échappent alors au monde de la lithographie traditionnelle. De nouvelles technologies ou des améliorations profondes de celles qui existaient sont ainsi apparues pour tenter de réaliser des micro structures où cette troisième dimension (la hauteur) pourrait être bien plus grande que les dimensions latérales habituelles. Un critère, non absolu, de classification de ces "grandes micro structures" est le rapport hauteur sur largeur d’une microstructure que l’on nomme rapport de forme (RF). S’il ne dépasse pas quelques unités pour la lithographie classique, il peut atteindre plusieurs dizaines avec ces nouvelles technologies. Tout en se méfiant des rapports d’échelle et des comparaisons, notre tour Eiffel ne présente qu’un RF de quatre.
Le LIGA est un acronyme allemand qui résume les trois grandes étapes du procédé :
LI (Lithografie) pour lithographie par rayons X avec le rayonnement synchrotron
G (Galvanoformung) pour électrodéposition (ou électroformage, ou électrocroissance)
A (Abformung) pour moulage.
Le procédé LIGA a vu le jour en Allemagne vers la fin des années 1970 au Forschungszentrum de Karlsruhe (FzK). Il s’y est développé comme une alternative à la fabrication de micro buses pour la séparation d’isotopes de l’uranium. La réalisation de ces pièces épaisses comportant des ouvertures micrométriques fut un succès et l’idée d’utiliser cette technologie pour d’autres champs d’application ne tarda pas. Toutefois, ce n’est vraiment qu’au début des années 90 que cette jeune technologie a pris son essor et s’est étendue de par le monde. Aujourd’hui, on peut dire que l’ensemble, ou presque, des centres de rayonnement synchrotron possède ou développe une activité de type LIGA.

Dans sa première étape, le procédé LIGA n’est qu’une extension des techniques de micro lithographie dans le sens où l’on transfert, sans réduction, l’image bidimensionnelle d’un masque dans une résine (un polymère) sensible aux radiations. La différence vient de ce qu’il s’agit à présent de résines épaisses (jusqu’au millimètre ou plus) déposées sur un substrat métallique et que cela a des conséquences. La source lumineuse n’est plus une lampe UV (comme en lithographie classique) pas plus qu’une source de rayonnement synchrotron X mous (comme c’est le cas en nanolithographie), mais une source de rayonnement synchrotron à haut flux de rayons X durs émettant un rayonnement de quelques dixièmes de nanomètre. Du fait de l’extrême collimation naturelle d’un faisceau synchrotron, des tolérances dimensionnelles d’une fraction de micromètre sont possibles. Cette propriété est l’un des atouts essentiels du LIGA. Bien évidemment, la technologie des masques est aussi particulière.
La deuxième étape consiste à développer l’image latente transférée dans le volume de la résine par le biais d’une dissolution chimique sélective entre zones irradiées et vierges. Cette étape s’achève par l’électrodéposition d’un métal, dans le moule de polymère, qu’on laisse généralement déborder pour obtenir un contre moule métallique.
A ce stade, "un outil" a été créé à partir duquel on pourra reproduire "à l’infini" les microstructures qu’il contient, soit par emboutissage, soit par injection (d’un autre métal ou d’un polymère). Cette troisième étape du LIGA devrait être du ressort de l’industriel concerné par l’application qu’il désire commercialiser.

De nombreuses variantes existent dès la deuxième étape du procédé. On voit déjà un autre intérêt du LIGA en ce qu’il donne accès à la réalisation, à moyenne ou grande échelle, de microstructures en polymères, en métaux ou alliages, voire en céramique.
Cet axe de Recherche et Développement a d’abord grandi au Laboratoire pour l’Utilisation du Rayonnement Electromagnétique (LURE, Orsay) depuis l’année 1992 jusqu’à l’arrêt définitif des machines (fin 2003) puis du centre en 2005. Il se poursuit actuellement au sein de l’Unité Mixte de Physique CNRS-THALES pour ce qui concerne les étapes hors faisceau synchrotron. La lithographie par rayons X s’est effectuée sur le centre ANKA (Karlsruhe, Allemagne) de 2005 à 2009 en attendant la construction de synchrotron « SOLEIL » à Saint Aubin ainsi que la mise en place en 2009 du scanner dédié à la lithographie X sur la ligne Metrologie et Tests.

Depuis 2014 une nouvelle configuration permet de travailler soit avec le faisceau blanc soit en lumière monochromatique. La première configuration qui est classique permet d’exposer des résines épaisses (jusqu’à quelques mm) et peu sensibles. La deuxième configuration est adaptée aux travaux sur des résines très sensibles et plus fines (quelques microns à quelques dizaines de µm) et à réaliser des expositions avec des masques à niveau de gris ce qui permet des générer des pentes ajustables au niveau des flancs des motifs. Elle devrait aussi permettre d’atteindre des résolutions sub-microniques de manière reproductible.

Nos projets de recherche sont menés avec des partenaires académiques en France et en Europe (Italie, Allemagne, Danemark…), des instituts de recherche comme l’ONERA, SOLEIL… et aussi avec des partenaires industriels : THALES, ALCATEL, SAGEM... Les réalisations touchent des thématiques aussi variées que l’optique et l’énergie : sources et composants pour le rayonnement THz, « standards » de calibration et développement de moyens d’analyse avec les rayons X, contrôle de polarisation et déflection de laser infrarouge, micro-turbine…, mais aussi la chimie (réacteur électrochimique, micro-mélangeur, électrophorèse) et la biologie (support de contrainte mécanique pour cellules biologiques). En recherche fondamentale, nous participons à des développements dont le but est d’améliorer la compréhension des propriétés intrinsèques des matériaux allant des supra conducteurs aux oxydes et de la matière sous des conditions extrêmes (hautes pressions, hautes températures). Des exemples de réalisation sont présentés ici :
Contrôleur de polarisation dans le domaine de l’infra-rouge et déflecteur LASER
Laser de puissance
Source THz de petite dimension
Multiplexeur 2, 3 et 5 faisceaux pour les THz
Analyse de front d’onde, type Hartmann
Knife–edge pour caractériser les faisceaux de rayons X de petites dimensions
Pin-holes pour les mesures en diffraction coherente sur rayonnement synchrotron
Standards de alibration pour sources de rayons X
Shadow-mask pour la réalisation de contacts in situ lors de la croissance d’oxydes par ablation Laser
Masques d’implantation d’ions lourds à haute énergie pour l’étude des couches de matériaux supra-conducteurs et Masque en cuivre pour l’implantation de capteurs dans une enclume de diamant
Micro bobine en cuivre : génération d’un champ magnétique intense par impulsion